Désirs et Prétentions |» PV Drake

DESIRS ET PRETENTIONS
Quand un voeu si cher se réalise...

J'étais très reposé ce matin là.
Ma nuit a été calme, sans agitation. Ces derniers temps, j'arrivais à m'endormir facilement. Rien d'étonnant à cela puisque je n'avais plus aucun remord, plus rien ne me préoccupait. J'avais réussi à surmonter mes meurtres. J'avais même fait plus que ça. Anciennement, chaque goutte de sang versée était un blasphème, une source de souci. Maintenant, c'était un besoin. J'aimais tuer, j'aimais voir la douce couleur rouge teinter une peau claire. Et pourquoi s'en priver ? J'avais des droits sur la vie d'autrui. Je pouvais les abattre aisément, les assassiner avec pour seul condition la valeur. Je n'étais pas aussi lâche que mon père pour attaquer quiconque par derrière. Quand j'aspirais le dernier souffle de vie de mes victimes, je les regardais dans les yeux, face à eux. Ils n'étaient jamais attaché, et s'il étaient à terre, c'étaient eux qui s'étaient écroulés de fatigue ou de dépit.
Il était encore très tôt, bien trop tôt pour espérer calmer ma soif journalière. Généralement, je me défoulais sur des animaux, ne préférant pas attirer la haine de mon chef. C'était, si je puis dire, une des seules personnes qui m'inspiraient une certaine crainte. Ce n'était néanmoins pas assez pour réfreiner mes envies. Et j'étais assez égoïste pour ça, à mon plus grand plaisir !

Je sortis de mes appartements pour m’aérer. La journée était claire, sans aucun nuage pour troubler le ciel. Tout s’annonçait merveilleusement bien, et j'étais déjà tout prêt à m'enfuir loin du camp. J'avais besoin avant tout de liberté. Une liberté que j'avais mérité après toutes ces années où je ne pouvais pas faire un geste pour moi. J'avais été dans un tel état de dépendance il y a quelques années que je dégustait chaque seconde de mon autonomie.
Je me rendis soudain compte que c'était mon premier meurtre qui avait tout déclenché. L'heureuse opportunité qui s'était ouverte à moi n'avait pas été un coup du hasard. Ce n'avait pas été une erreur, comme je l'avais tant pensé par la suite.
Un sourire cruel étira mes lèvres.

Je fus rattrapé par mon vif désir de quitter cet endroit. A grands pas, je traversais le centre du camp et quittais ce lieu. Sans vraiment savoir où je me dirigeais, je délectais la pure sensation que me procuré ma solitude. Le murmure de mes pieds écrasant l'herbe tendre me faisait vibrer. Quoi de mieux qu'une petite promenade matinale, avec pour final bien sur, une bataille. J'essaierai cette fois de trouver un animal plus féroce que celui de la veille, qui n'avait été qu'un vulgaire cerf. Un carnivore ferait volontiers l'affaire.
Sans m'en rendre compte, j'avais atteint Les Eaux-Vives, un endroit plutôt tranquille. Quelques humains vagabondaient dans un village non loin. Je n'y accordais aucune importance. A vrai dire, j'avais quelque chose en face de moi qui était bien plus digne d’intérêt. Une silhouette s'était distinguée non loin de la. Une ombre plutôt importante et qui certifiait d'être prometteuse. Je m'activais, espérant avidement que mes espérances n'étaient pas seulement le fruit de mes désirs.
Totalement inconscient suite à ma précipitation, j'avais eu le malheur de prévenir mon absence. J'étais maintenant assez près de lui pour voir qui s'était. Je ne le connaissais pas, sa stature m'était inconnue, pourtant, mes convictions s'étaient faites juste, à mon plus grand bonheur.
J'avais devant moi un homme.
Mon plus bel espoir de combat n'avait jamais été aussi près de se réaliser.

Cette nuit là, j'ai encore fait le même rêve.
Ce rêve qui me hante depuis plus de quinze ans. Je pensais qu'avec le temps il s'estomperait. J'avais tord. Au contraire, depuis que je me force à oublier ma haine, il revient plus violent que jamais la nuit. Me forçant une nuit blanche et ravivant ce désir de vengeance au cœur de mon ventre.
Je ne veux pas qu'une seule personne - même mon général - me voit dans cet état, des cernes immenses sous les yeux, les habits collant à la peau et des tremblements intempestifs.

Je décide donc de faire quelque chose. Une chose que je n'ai jamais osé faire. Cette chose me fait peur. Cette peur, la dépendance. Mon idée : Tuer pour calmer cette rage, pour m'éviter de sauter sur la première personne de ma citée ! Ce qui serait plutôt mal vu pour un Roi. Je veux juste que ces insomnies cesses... que ce cauchemar me laisse tranquille. C'est pas demander la lune au fond. Je me surprend à me plaindre sur mon sort. Non, ça, je ne le veux pas, jamais. Il y a d'autres personnes, beaucoup d'autres personnes qui ont moins de chance que moi ... comme la vie. La vie qui n'est pas donnée à tout le monde. La première image qui me vient est celle de mes parents. Il vaut mieux pas que je m'éternise ici.

J'ouvre mon armoire. Entre les différents habits de cérémonies je prend Kine-Laï que j'attache à ma ceinture. Quant à Rwang-Mü elle retrouve sa place habituelle dans mon dos. Cette fausse épée de bois, elle me rassure, je décide donc de l'ajouter à mon équipement. Je la range aux côtés de Rwang-Mü. L'odeur acre du poison m'envahit les narines, j'avais presque oublié d'en enduire l'épée Verte. Sitôt dit, sitôt fait, en quelques minutes Rwang-Mü se retrouve aspergée de poison paralysant. Je passe ensuite une bombe qui efface toutes les odeurs et couleurs. Rendant une illusion parfaite.
J'hésite à mettre une armure ... oui non... oui non. Je finis par opter pour une cuirasse légère qui ne me gênerait pas dans mes mouvements. J'ajoute par dessus mon habituel manteau de fourrure et le collier de mon père.

Dans mon vaste appartement de fait quelques mouvements pour réchauffer mes muscles. Me sentant fin près, je bondis par la fenêtre pour un maximum de discrétion. J'emprunte le tunnel qui m'est réservé pour sortir de la citée. Le plus dur est fait. Je me met alors à courir vers les Villes Humaines, espérant y trouver mon bonheur. Le soleil pontait à l'horizon et je m'apprêtais à faire le grand saut.
Sauf qu'un imprévu est apparut sur ma route. La brise m'a apportée une odeur étrange. Je me suis sentis d'un coup très mal. Je ne pouvais plus reculer, alors j'ai continué d'avancer. La silhouette a prit des formes plus elfiques. Quand me suis rapproché, j'ai compris que c'était un Drow. Sa peau noire me rappela pendant une seconde celle de ma mère. Une seconde plus tard la rage m'avait envahit et Kine-Laï était déjà dégainée...

Je retrouvais ma face bestiale.
Mon premier réflexe – qui devenait si fréquent maintenant – fut d’analyser la situation, et surtout, de l'examiner, lui. Sa peau était brune, mais beaucoup trop claire pour un elfe de Soleil pur. De plus, c'est cheveux était d'une nuance châtain étonnante. Il était sang-mêlé, ça ne faisait aucun doute. Il était grand, même un un peu plus grand que lui. Plus âgé peut-être. Il avait du mal à tirer des informations de son physique. Il n'avait jamais été doué non plus pour ce genre de déduction. Il n'avait pas fini ses observations quand l'inconnu tira une arme de son fourreau. Son équipé était un sabre, mais il découvrit aussi une autre lame, dans son dos. C'était un guerrier.
Cela ne s’annoncerait pas spécialement bien pour lui en cas de duel. Il était médiocre pour les combats singuliers. Sa souplesse laissait à désirer, et il n'avait pas d'arme – il n'avait surtout pas le droit d'en avoir – pour se défendre. Dans tous les cas, il n'aurait pas su s'en servir. Sans compter que sa magie était quasiment incontrôlable : elle ne se manifestait qu'avec des sentiments puissants. Par chance, il était venu ici avec le but de se battre et son désir ne s'était pas assouvi. Il était maintenant doué pour transformer ses sentiments en haine.
Pourtant, un doute subsistait toujours.

Je ne m'étais pas attendu à ce que l'étranger soit aussi prompt. En effet, il m'avait menacé de son arme à une vitesse de réaction étonnante. J'en déduis qu'il voulait vraiment se battre. Ça me convenait. Je dirais même que cette invitation était des plus agréables. Si j'avais été dans une situation autre, je l'aurai remercié. Heureusement, parce que cela serait très déplacé et surtout des plus étranges, et puis je n'avais pas à m'abaisser avec de telles reconnaissances.
Néanmoins, je ne pus me retenir de sourire, mais pas un sourire satisfait comme bien des personnes auraient pu le croire. C'était un sourire remplit de cruauté et d'envie sanguinaire. Cela faisait si longtemps que je rêvais de rencontrer une personne ayant un désir équivalent au mien ! Bien sur, nous ne nous reverrons plus jamais, mais j'éprouvais le besoin de le connaître, juste son nom. Savoir qui aura contenté mes besoins, ou qui sera l'heureux qui m'aura tué.
Juste pas principe.

« Et bien, je m'attendais à tout sauf à cela ! Comment vous appelez-vous ? »

Une note de béatitude avait fait chantonner ma voix. J'aurais voulu me contrôler un peu plus, mais je n'avais pu faire plus. C'était la première fois qu'une telle chose m'arrivait, la dernière aussi sûrement et je n'avais jamais été aussi heureux. Heureux dans ma future mort ou dans mon prochain triomphe.
Il ne me restait plus qu'à espérer que ce soit un homme plein de dignité ou du moins qu'il combatte avec honneur; qu'il ne soit pas un double de mon père. Les lâches que sont pas des elfes qui méritent de vivre. S'il était tel, je me ferais un excellent plaisir de nettoyer cette terre d'une telle abomination...

A peine je m'étais avancé vers lui,
qu'un sourire se dessina sur son visage. Ce sourire, m'emporta dans une rage folle, comment osait-il se montrer aussi irrespectueux devant moi ?! Il est vrai qu'il ne doit pas me connaître, mais même, on ne sourit pas à une personne qui est prête à vous bondir dessus ! Non, je ne conçois pas cette idée. Il croyait peut-être me faire peur avec sa forte carrure et sa peau d'un noir de jais ? Eh bien il se trompait sur toute la ligne, j'avais beau me douter qu'il était magicien, aujourd'hui, je ne reculerai pas devant une espèce aussi misérable que la sienne qui a en plus avoir avec la mort de mes parents. Non, aujourd'hui, c'est moi qui prend les choses en mains, et c'est ma main qui va enfin venger les injustices qu'ont subi mes parents. J'ai déjà attendu trop longtemps et je sens qu'aujourd'hui, je pourrais tout faire pour accomplir ma vengeance. Aujourd'hui, mais pas seulement, un seul corps inerte ne me suffira pas, je veux du sang ! Beaucoup de sang ! Je veux qu'ils payent, TOUS, pour leur cruauté, pour ceux qui vivent leur petite vie tranquille sans connaître la souffrance. Je veux leur montrer à tous cela ce que j'endure depuis tant d'années. Je veux enfin libérer cette haine, aujourd'hui, ma vie reprend enfin un sens. Un sens grâce à cette chose misérable qui se traîne devant moi. En plus, elle ose me parler, je n'ai pas le temps pour ça.
Mais, un petit quelque chose me contredit, sûrement l'honneur, l'honneur qui me dicte que je dois lui donner le nom de son assassin.

" - Je suis celui qui te donnera la mort, Drake, illustre représentant de la Nation du Soleil. " J'imitais une petite courbette pour lui montrer que je n'avais pas que ça à faire ... mais, que son cas était tout de même assez intéressent. " Et toi, petit inconscient, quel est ton nom ? "

De ma main droite je tenais Kine-Laï en imitant un combat d'escrime, me rapprochant de plus en plus de lui. Si près que j'eus presque peur de lui transpercer le ventre quand ma lame arriva à sa portée. Je lui adressais un sourire, non, je n'aurais pas osé le tuer comme ça. J'ai tout de même un honneur de Guerrier à conserver. Je mourrai et tuerai en gardant ça à l'esprit...